La jeune scène Slam de Paris

 


 





En quoi diffère le Slam du rap ?

Patrick : Pour le Slam, il n'y a pas forcément de musique derrière, et donc il n'y a pas de contraints musicales, il n'y a pas de contraintes rythmiques, la différence que je vois, c'est que dans le slam c'est beaucoup plus libre au niveau de l'expression orale, et au niveau d'écriture. On peut aborder les choses de façon beaucoup plus vague, beaucoup plus imaginatif, beaucoup plus créatif. C'est ça qui est intéressant, au niveau de l'écriture.

Patrice : C'est vrai que dans le Rap, il faut que ça soit rythmique, il y a la rime qui tombe à chaque bout de phrase. Dans le Slam il y a une ouverture d'esprit qui fait que le slam peut être un improvisation, et dans l'improvisation c'est pas toujours évident pour trouver des rimes, et donc les rimes ne tombent pas forcément. Dans le Slam, on peut construire des histoires, et les histoires, c'est pas forcément des rimes, c'est juste quelqu'un qui va parler, il va parler des choses très fortes, il va les faire ressentir avec sa propre rythmique. C'est ça aussi, parce qu'il y a pas de musique, donc l'artiste ne peut pas se cacher derrière un rythmique. On a rencontré plusieurs artistes de Rap, ils n'ont pas osé prendre le micro lors d'une soirée slam parce que justement la musique allait les cacher, ils avaient peur de mettre en avant leur voix. Alors que dans le Slam, c'est vraiment la voix qui fait tout. Avec les émotions qui transparaissent.

Patrick : Le Slam, pour les rappeurs, je considère ça comme une exercice de style quoi. Je trouve que c'est hyper formateur pour la présence, pour l'interprétation. C'est vrai que nous, à Saint-Denis, pour l'association, on s'est dit que Saint-Denis, c'est une assez grande ville au niveau du Hip Hop et tout ça, les gens connaissent pas mal de gens qui font du rap à Saint-Denis, on s'est dit "tiens, ils vont venir.". On a essayé, on n'a pas vraiment réussi. On se dit que c'est vraiment dommage, parce qu'ils ont raté quelque chose. Le peu de rappeurs qui sont venus quand même, ils ont appréciés. Parce que, justement, c'est un autre trip. C'est un autre façon de faire vivre son texte, et de se mettre en danger un petit peu.

Patrick, tu es slameur n'est-ce pas ?

Patrick : Moi, à la base, je suis rappeur et je suis venu au slam. J'ai connu déjà le terme "Slam". On l'a découvert en 98, quand le film "Slam" est sorti en France. Après, j'ai découvert les soirées slam sur Paris, en novembre l'année dernière. Puis on a crée l'association, et à partir du janvier dernier, on a milité pour organiser les soirées Slam aussi sur Saint-Denis. Ca fait deux ans et demie qu'on est plus ou moins dans le Slam.

Dead Prez, Mos Def, Saul Williams... si je ne me trompe, sont venus au Hip Hop par le Slam. Est-ce que la même chose est arrivé en France ?

Patrice : Je crois pas, en France non. Parce que notamment, la plupart des plus grands artistes du rap en France qu'on voit actuellement, c'est vraiment les anciens, dans le sens où ils étaient présents au début. C'est pour ça que le Rap en France, il y a encore de la crédibilité, c'est des pionniers du rap français qui sont maintenant à la tête du business. Mais les artistes du rap français qui sont à la base des slameurs, je pense pas, non.

Mais cela va peut-être venir ?

Patrick : Non, à mon avis ça va être plutôt l'inverse, ça va être des rappeurs qui vont retourner avec du Slam. Parce que justement, on parlait des anciens, il y a pas mal des anciens, par exemple Solo, qu'on a rencontré une fois, ça nous a fait plaisir de le voir lors d'une soirée Slam. Il disait "depuis des années je freestyle dans mon coin, il n'y a plus cet esprit de "freestyle", cet esprit Hip Hop est un peu perdu, genre "on est là, posé, dans la rue" tout ça." Donc, il disait qu'il savait pas qu'il y avait des soirées slam sur Paris. Il était hyper content de voir ça. Au Côté Zèbre, il est venu, il a écouté, et il a participé. Il n'avait pas l'intention de participer, il est venu juste pour voir, pour écouter.

Patrice : Avant, il faisait partie d'Assassin, il fait vraiment partie de l'ancien école. Il était un des premiers, baigné dans le rap depuis le début. Donc, il est venu, il a écouté, ça lui a plu, il était surpris premièrement par la qualité des textes et aussi par la qualité de l'interprétation. Il pensait même pas intervenir, mais ça l'a tellement intéressé qu'il s'est mis au micro. Donc, ça va pas être les rappeurs qui vont émerger du Slam, ça va être les rappeurs qui vont vouloir retourner aux sources du Hip Hop, à la base du Hip Hop, retrouver toute la culture, tout ce qu'il y a du positif. Ça va pas être des rappeurs qui vont émerger du Slam. Parce que on a vraiment l'impression que les rappeurs sont un petit peu perdus, il y a le Hip Hop un petit peu partout, mais en fait le Hip Hop, c'est pas le Rap, et c'est vrai que le Hip Hop, comme il est partout, il est vraiment vu comme il est le Rap. "Le Hip Hop, c'est le Rap". Mais c'est pas le cas. Je pense que les rappeurs vont se mettre au Slam pour retrouver les sources mêmes du Hip Hop.

Toi aussi, tu es slameur ?

Patrice : Moi, j'ai tenté de faire des textes, mais je suis pas rappeur, je suis beaucoup plus axé sur les sons. Pour qu'un chanson me plaît, il faut d'abord que je suis attiré par les musiques, et puis par les textes. Je pense pas que je pourrais me mettre aux textes.

Comment voyez-vous l'avenir de l'association ?

Patrice :
De faire un vrai plan du Slam, pour démontrer qu'en fait le Slam ce n'est pas simplement une affaire parisienne, que le Slam, ça vient de la rue, c'est vraiment raconter sa vie. Ça rapproche du rap par cet aspect là, mais ça en éloigne parce que ça donne beaucoup plus de liberté que le Rap. Donc, on va essayer de faire partager le Slam, et ensuite on va tenter de mettre en place des projets musicaux, pour produire des artistes. Donc pour l'avenir, le Slam et la production musicale.

 

 

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